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BDS - Boycot Désinvestissement - Sanctions

L’Allemagne exclut les colonies de ses subventions dans le domaine de la haute technologie[1]

Lundi, 27 janvier 2014

lundi 27 janvier 2014

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Israël espère pouvoir faire annuler une clause qui risque de compliquer le renouvellement d’ accord de coopération scientifique avec l’Allemagne.

Le gouvernement allemand est en train de conditionner la poursuite de ses subventions aux sociétés israéliennes de la haute technologie, ainsi que le renouvellement d’un accord de coopération scientifique, à l’inclusion d’une clause territoriale. Celle-ci précise que les entités israéliennes situées dans des colonies de Cisjordanie ou dans Jérusalem-Est ne seront pas éligibles aux subventions. Israël s’inquiète que le mouvement déclenché par les Allemands n’entraine d’autres membres de l’Union européenne à sa suite.

La décision allemande représente une avancée significative dans les mesures prises par l’Europe à l’encontre des colonies. Alors que l’accord de coopération scientifique « Horizon 2020 », signé entre Israël et l’Union européenne il y a quelques semaines n’excluait de ses subventions que les travaux de recherche académiques menés dans les colonies, Berlin a étendu cette règle aux compagnies privées situées de l’autre côté de la ligne verte. Il semble bien que le mouvement de boycott des institutions de Bruxelles contre les colonies s’est maintenant étendu à des membres individuels de l’UE.

Un officiel du ministère des Affaires étrangères israéliennes a déclaré qu’étant donné la « relation particulière » avec l’Allemagne et le fait que celle-ci est considérée comme le meilleur ami d’Israël en Europe, toute soumission aux conditions allemandes risque d’établir un précédent pour toute l’Europe. « L’Allemagne va instituer un exemple pour toute l’Europe » et « nous voulons aussi éviter une situation où chaque décision de la Commission européenne soit adoptée par chacun de ses 28 Etats-membres », ajouta-t-il en faisant allusion à l’insistance de la commission sur une clause territoriale dans l’accord Horizon 2020. Depuis que celui-ci a été signé voici deux mois, l’Allemagne est le premier pays à imposer ce type de disposition dans ses accords bilatéraux avec Israël.

Sous la contrainte de l’anonymat, des officiels de haut niveau du gouvernement israéliens ont déclaré que Jérusalem négocie actuellement deux accords avec Berlin qui permettraient de faire passer des fonds du ministère allemand fédéral de l’Education et de la Recherche vers des institutions académiques et des sociétés de haute technologie israéliennes. Le premier, promouvant la coopération entre scientifiques allemands et israéliens, avait été signé dans les années 1970 et régulièrement reconduit depuis. Il met à disposition un fonds de 12 millions de shekels (environ 2,5 millions d’euros) de subventions pour des projets de recherche menés conjointement par des universités allemandes et israéliennes. Toutefois un changement majeur s’est produit au cours du dernier renouvellement de l’accord : Israël a réévalué une institution d’Ariel, une colonie de Cisjordanie[2], du statut de collège à celui d’université. Les officiels allemands ont alors informé leurs collègues israéliens il y a plusieurs mois des pressions exercées par leurs universités sur le ministère fédéral afin qu’il ne coopère pas avec des institutions situées en Cisjordanie ; en conséquence, le ministère a décidé qu’au prochain renouvellement de l’accord il imposerait une nouvelle clause interdisant le versement de tout fonds destiné aux institutions académiques des colonies. Les officiels allemands ont ainsi clairement annoncé à leurs correspondants israéliens que les chercheurs de l’Université d’Ariel ne pourront pas demander de subvention.

La clause territoriale que Berlin veut inclure existe déjà dans un autre accord bilatéral : le traité de 1986 établissant la Fondation germano-israélienne pour la recherche et le développement scientifiques. Elle dit : « les projets patronnés par la Fondation en Israël ne peuvent être conduits que dans les limites géographiques situées sous la juridiction de l’Etat d’Israël avant le 5 juin 1967 ».

Les Allemands veulent aussi introduire cette clause dans un deuxième accord bilatéral qui implique des budgets bien plus importants. Celui-ci, signé entre le ministère fédéral et celui, israélien, de l’Economie, prévoit des aides allemandes pour les recherches et développements appliqués et industriels – en clair des subventions pour des « startups » et des sociétés privées de la haute technologie. En fait, le renouvellement de cet accord n’est pas prévu dans le futur immédiat mais les Allemands imposent néanmoins l’inclusion de la clause territoriale pour les nouveaux appels à candidature, éliminant ainsi toute entreprise ayant des liens avec les colonies de Cisjordanie ou de Jérusalem-Est. La semaine dernière des représentants allemands ont rencontré leurs homologues du ministère de l’Economie israélien à ce sujet.

Jusqu’à présent, Israël a toujours refusé d’ajouter la clause de 1986 à aucun de ces deux accords. Les allemands ont alors proposé une alternative : utiliser la formule contenue dans Horizon 2020 interdisant les subventions aux activités situées dans les Territoires occupés et en acceptant les mêmes réserves ajoutées par les Israéliens à cet accord, à savoir que celui-ci ne prédétermine pas le statut final des frontières, celles-ci dépendant du résultat des négociations israélo-palestiniennes en cours. Mais Israël a aussi rejeté cette alternative, craignant d’établir un précédent qui pourrait rapidement être adopté pour d’autres accords bilatéraux avec les 27 autres membres de l’UE ou même d’autres pays.

Ze’ev Elkin, le ministre délégué aux Affaires étrangères a donné l’ordre à son équipe de commencer d’intenses négociations avec le gouvernement allemand, d’abord sur l’accord de coopération scientifique, puis sur celui concernant la haute technologie. Le but étant de les achever en quelques semaines, avant la réunion entre les cabinets israéliens et allemands prévue à Jérusalem dans environ un mois. « Notre but est de trouver une solution différente que celle retenue pour Horizon 2020 et d’obtenir une formulation plus atténuée » a déclaré ce même officiel du ministère des Affaires étrangères.

[1] Article de Barak Ravid paru dans Haaretz « Germany conditions high-tech, science grants on settlement funding ban ». Traduction Michel (UJFP)

[1] Ariel est une des colonies israéliennes les plus importantes de Cisjordanie : environ 18 000 habitants qui occupent près de 15 km², elle possède 2 zones industrielles avec une trentaine d’usines, une université importante (12 000 étudiants), 2 centres commerciaux et un théâtre qui est l’objet d’un boycott important. Ariel est située à 15 km au SE de Naplouse.