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Coup de gueule et bien nécessaire mise au point (ndlr)

« Le mouvement pour la libération de la Palestine n’a rien à voir avec l’antisémitisme »

Mardi, 28 mai 2013 - 14h24

mardi 28 mai 2013

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Sans égard ("quant" ndlr) à la validité de la thèse de Joseph Massad sur la relation historique et dialectique entre le sionisme et l’antisémitisme, pourquoi Massad tente-t-il de justifier le mouvement de libération palestinienne sur une base de combat contre l’antisémitisme ? Assurément, Massad est loin d’être le seul palestinien à mettre l’antisémitisme et d’autres questions juives au cœur de la lutte palestinienne. Ali Abunimah mène une véritable campagne pour assurer à la communauté juive que le mouvement de libération palestinienne est exempt de l’antisémitisme. En outre, plusieurs grandes organisations et coalitions de solidarité avec les palestiniens posent l’anti-antisémitisme comme une de leurs déclarations de base.

Depuis quand lions-nous les droits des palestiniens et la libération de la Palestine avec le sort des juifs et l’antisémitisme ? Pourquoi est-ce que des palestiniens permettent aux juifs et aux intérêts juifs – y compris le sionisme et l’antisémitisme – de s’imposer sur l’agenda palestinien ?

Le terme « sémite » sort de la mythologie où toutes les langues du monde sont issue de la migration des fils de Noé - Sem, Cham et Japhet - dans différentes régions du monde après le déluge, et la création conséquente de groupes linguistiques différents : sémitique, hamitique et japhétique. Les fils de Noé ? Voulons-nous vraiment nous souscrire à cette absurdité ?

Pour aggraver les choses, cette absurdité a été étendue à des « races » fictives et non seulement aux langues. « Antisémite » est donc descriptif de l’hostilité des races hamitiques et japhétiques envers les descendants du troisième frère, Sem. Personne ne parle sérieusement des races hamitiques et japhétiques. N’est-il pas temps de reconnaître combien il est absurde de parler ainsi d’une « race » sémitique ?

Encore plus absurde, c’est la tentative d’utiliser ces concepts mythologiques pour mesurer la valeur de la cause palestinienne. La cause palestinienne n’a rien à voir avec les juifs, les sémites, l’antisémitisme, Dieu, Abraham, Jésus, Mahomet, Moïse, Noé, Jacob, Ismaël, Sem, Cham et Japhet, que vous croyez en eux ou non. Cela n’a rien à voir avec l’holocauste, avec le colonialisme, avec les romains, les byzantins, les qrabes, les croisés, les turcs ou les britanniques.

Il a tout à fait à voir avec l’expulsion des palestiniens de leurs terres et la négation de leurs droits de souveraineté et de l’autodétermination, et surtout leur droit au retour. Peu importe qui les a expulsés. C’est leur terre et ils ont le droit d’y retourner. Peu importe qui nie leur existence. Ils ont le droit de retourner.

Il n’y a même aucune importance si ce sont des gens gentilles ou méprisables, s’ils sont racistes ou humanistes, qu’ils soient musulmans, chrétiens, juifs, bouddhistes ou shintoïstes, qu’ils soient propres ou sales, éduqués ou analphabètes, riches ou pauvres, démocrates ou monarchistes. Ils ont le droit de retourner dans leurs foyers et de reprendre leur pays.

Leurs droits ne peuvent pas être l’otage des droits d’autrui. Si la justice pour les palestiniens ne peut être obtenu au prix d’une injustice aux autres, même la justice pour les autres ne peut être acquise au prix de l’injustice envers les palestiniens. La justice est indivisible, mais nous ne devons pas attendre qu’elle se produise partout pour qu’elle se réalise en Palestine.

Les Palestiniens ne peuvent pas s’attendre à ce que le niveau de CO2 soit inférieur à 350 ppm, ni que la population de baleines bleues reprenne à augmenter, ni que persécution des Rohingyas s’arrête en Birmanie, ni même qu’on mette fin à la purification ethnique au Congo, ni que les victimes européennes de la seconde guerre mondiale et leurs descendants soient compensés, ni que les peuples autochtones partout dans le monde reprennent leurs droits et leur patrimoine.

La justice est indivisible, mais le rétablissement de la justice dans un seul cas est capable d’augmenter le niveau de justice partout dans le monde. La restauration de la justice en Palestine bénéficie au monde entier et donne de l’espoir à la justice qui lutte toujours à se rétablir dans d’autres lieux et à d’autres peuples.

L’antisémitisme n’est pas lié à la libération palestinienne plus que l’anti-hamitism ou anti-japhetism ou toute autre tentative d’évaluer la cause palestinienne par rapport à son approbation ou rejet des intérêts des autres. Veuillez retirer de telles distractions du débat sur les droits des palestiniens.

Paul Larudee est un écrivain et défenseur des droits de l’homme, et l’un des co-fondateurs du mouvement pour briser le siège de Gaza par voie maritime.