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Israël célèbre 65 années de crimes et de nettoyage ethnique

Mardi, 23 avril 2013 - 9h49

mardi 23 avril 2013

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Quiconque disposant d’intégrité intellectuelle ou historique, ne mettra pas en cause le massacre sanglant qui a eu lieu dans le village de Deir Yassin, il y a 65 ans, coûtant la vie à plus de 100 Palestiniens innocents. Les tentatives de dissimuler ce massacre ont été mises en échec par les sombres détails révélés par des historiens réputés, dont certains sont par ailleurs israéliens.

Rassemblement des proches, autour des dépouilles des membres de la famille al-Dalu - massacrés par un bombardement israélien - lors de leur enterrement dans la ville de Gaza, le 19 novembre 2012 - Photo : APA/Majdi Fathi

Même les récits proposés par des historiens comme Benny Morris - un chercheur honnête, qui est cependant resté attaché au sionisme malgré l’histoire horrible qu’il avait lui-même mise en lumière - a présenté une version poignante des événements qui se sont déroulés ce jour-là : « Des familles entières ont été criblées de balles ... hommes, femmes et enfants ont été fauchés alors qu’ils quittaient leurs maisons ; des gens ont été emmenés à l’écart et fusillés. Un rapport de la Haganah indique : « il y avait des tas de morts. Certains des prisonniers rassemblés de force, dont des femmes et des enfants, ont été assassinés sauvagement par leurs ravisseurs ... »

C’était les milices sionistes de l’Irgoun, de Menachem Begin, ainsi que les gangs du groupe Stern (Lehi) d’ Yitzhak Shamir, qui ont commis cette infamie ce jour-là, et les deux ont été généreusement récompensés pour leur « héroïsme ». Ceux qui étaient un moment des criminels recherchés, sont devenus premiers ministres israéliens dans les années ultérieures.

L’importance du massacre de Deir Yassin pour les historiens obscurcit souvent des faits importants. L’un d’entre eux est que Deir Yassin était un des nombreux massacres perpétrés par les troupes sionistes, avec les unités de la Haganah. Un autre fait important est que ces milices ont ensuite formé conjointement les Forces de défense israéliennes (FDI) suite à la déclaration officielle israélienne d’Indépendance, le 14 mai 1948, en dépit de leurs divergences supposées lors de la conquête de la Palestine. David Ben Gourion avait pris sa décision le 26 mai et n’a pas hésité à inclure à la fois l’Irgoun et le Lehi, aux côtés de la Haganah. Non seulement les dirigeants des milices terroristes gagnaient respect et prestige au sein de la société israélienne, dans les forces armées et l’élite politique, mais les assassins mêmes qui avaient massacré des innocents, hommes, femmes et enfants ont bénéficié d’armes encore plus puissantes et ont continué à « servir » et à terroriser pendant de nombreuses années. Un autre fait souvent négligé, c’est que ce qui a commencé à Deir Yassin ne s’est jamais vraiment terminé. Sabra et Chatila, Jénine, Gaza, et bien d’autres sont des répétitions d’un même événement.

Mais une autre triste réalité est également apparue et s’est cristallisée au cours des 65 dernières années. Depuis 1948, le droit à un récit crédible a été largement réservé aux historiens israéliens. La plupart de ces historiens, indépendamment de leurs opinions, soit n’ont joué aucun rôle dans cette histoire, soit ont profité de ses résultats, soit étaient eux-mêmes des participants actifs. Pourtant, il fallait qu’un historien israélien finisse par « découvrir » un massacre dans un village palestinien à un moment donné dans le temps. Par exemple, ce n’est que lorsqu’un journaliste israélien, Amir Gilat, a choisi de publier un article dans le journal Ma’arive il y a quelques années, citant les recherches d’un étudiant de l’historien israélien Theodore Katz, que les médias occidentaux reconnurent le massacre de Tantura. Il importait peu que les descendants et les parents des 240 victimes de ce village terriblement dévasté, tués de sang froid par les troupes Alexandroni, n’ont jamais quitté le souvenir de leurs proches. Un « massacre » ne devient vraiment un massacre que lorsqu’il est, à contrecœur, reconnu par un historien israélien, peu importe le temps qu’il a fallu pour que cet fait remonte à la surface.

Même les historiens palestiniens, au moins ceux qui se plient aux lois des médias occidentaux et du monde universitaire, se retrouvent à utiliser principalement des sources israéliennes, des travaux d’écrivains israéliens reconnus, censés être plus fiables que les Palestiniens. La logique veut qu’un récit israélien compatissant sera mieux accepté par le public américain ou britannique que celui venant d’un Palestinien, même si l’historien palestinien a vécu l’événement et en connait les moindres détails sanglants.

Cette parodie du récit palestinien survit grâce à des analogies empruntées, des histoires empruntées et des historiens empruntés afin de profiter d’un iota de crédibilité. Ce n’est que la pointe de l’iceberg et le problème est beaucoup plus profond que cela.

Dans mon dernier livre, Mon père était un combattant de la liberté : histoire inédite de Gaza, j’ai dressé un compte rendu détaillé du massacre de Beit Daras, lorsque de nombreux habitants de ce courageux village, situé dans le sud de la Palestine, ont été abattus par les troupes de la Haganah quelques semaines seulement après que les habitants de Deir Yassin aient été massacrés d’une manière similaire. Beit Daras est le village d’où ma famille a été chassée, dépossédée, pour ensuite devoir survivre dans un camp de réfugiés dans Gaza.

Bien Daras Beit était situé dans la partie nord-est du district de Gaza, dans le sud de la Palestine. Ce vilage a été un objectif de la direction sioniste dès les premiers mois de la conquête. Le petit village est l’un des villages et villes destinés à la destruction dans l’opération Nachshon et Harel visant à couper complètement la zone Jaffa-Jérusalem [du sud de la Palestine]. La bataille de Beit Daras a commencé tôt, et de lourds bombardements ont eu lieu les 27 et 28 mars 1948, tuant 9 villageois et détruisant de vastes zones de cultures du village.

Plusieurs attaques sionistes avaient échoué et les villageois résistaient. Ce qui s’est avéré être la dernière bataille a eu lieu à la mi-mai. Oum Mohammed et Oum Adel étaient deux jeunes filles dans Beit Daras à l’époque. Aujourd’hui de vieilles femmes dans le camp de réfugiés de Khan Younis à Gaza, elles m’ont aidé à récolter quelques-uns des faits relatifs à ce qui s’est passé ce jour-là. J’en ai fourni le récit dans mon livre sur Gaza. En voici quelques extraits.

« Oum Adel se souvient :

Il a été demandé aux femmes et aux enfants de partir parce que les nouvelles du massacre de Deir Yassin étaient connues et que cela suscitait de grandes craintes. On nous avait dit que les juifs non
seulement massacraient les gens, mais violaient aussi les femmes. Elles devaient être envoyées au loin, tandis que les hommes resteraient. Mais tant d’entre eux ont été tués. Les hommes combattaient
comme des lions, et beaucoup ont été tués, dont Abou Mansi Nassar et ses deux frères, Ali Mohammed Hussain, et quatre jeunes venus d’al-Maqadima.

Oum Mohammed :

La ville était sous les bombardements et cernée de toutes parts. Il n’y avait aucune sortie. Elle était totalement encerclée, du côté d’Isdud, d’al-Sawafir et dans toutes les directions. Nous avons voulu
trouver une sortie. Les hommes [les combattants de Beit Daras] ont dit qu’ils allaient vérifier la route vers Isdud, pour voir si elle était encore ouverte. Ils se sont avancés et ont tiré quelques coups de feu
pour voir si quelqu’un répliquait. Personne ne l’a fait. Mais ils [les sionistes] étaient en embuscade. Les hommes sont revenus et ont dit qu’il fallait évacuer les femmes et les enfants. Les gens sont sortis [y compris] ceux qui s’étaient réfugiés dans notre très grande maison de famille. Il y avait là surtout des enfants. Si une bombe avait frappé la maison, elle les aurait tous tués. Les hommes sont venus et ont dit : ’La route vers Isdud est ouverte, allez tous par là’. Les juifs ont laissé les gens sortir, puis ils ont commencé à les bombarder et à leur tirer dessus avec des mitrailleuses. Plus de personnes sont tombées que celles qui pouvaient courir. Ma soeur et moi, nous nous sommes mises à courir à travers les champs, tombant et nous relevant, et nous nous sommes échappées ensemble, nous tenant par la main. Ceux qui se sont sauvés par la route principale ont été tués ou blessés comme ceux qui sont passés par les champs. Les balles pleuvaient sur les gens comme du sable. Les bombes d’un côté et les mitrailleuses de l’autre. Les juifs étaient sur la colline ; il y avait là une école et un réservoir d’eau pour le village et pour les cultures. Ils ont arrosé les gens avec des mitrailleuses. Un grand nombre de personnes ont été tuées et blessées.

Toutefois, beaucoup de combattants restèrent à Beit Daras. Même un tel massacre n’affaiblissait pas leur détermination. Les blessés ont été recueillis dans les maisons, mais avec peu de chances d’être soignés. Des morts ont été enterrés à la hâte. Beaucoup d’autres ne pouvaient être atteints, restant exposés au soleil, couchés dans les champs en fleurs. »

* Ramzy Baroud (http://www.ramzybaroud.net) est un journaliste international et le directeur du site PalestineChronicle.com. Son dernier livre, Résistant en Palestine - Une histoire vraie de Gaza (version française), peut être commandé à Demi-Lune. Son livre, La deuxième Intifada (version française) est disponible sur Fnac.com

Source : Info-Palestine